Modèle alimentaire

Le modèle alimentaire est un concept qui fait référence à un système complexe d’habitudes alimentaires qui sont déterminées par un ensemble de facteurs sociaux, culturels, économiques, politiques et sanitaires. En effet, ce modèle est élaboré à partir d’un ensemble de règles, de choix et de pratiques, qui déterminent la manière dont une société se nourrit et se nourritrit de manière saine.

Le modèle alimentaire est le reflet de la culture, des valeurs et des traditions de la société dans laquelle il est pratiqué. Il est influencé par des facteurs tels que l’histoire, la géographie, la religion, la politique et les conditions économiques de la société. Par exemple, dans certaines cultures, la viande est considérée comme un aliment de base, tandis que dans d’autres, la consommation de viande est limitée ou même interdite.

En outre, le modèle alimentaire est influencé par les politiques publiques de l’État, telles que les réglementations en matière de sécurité alimentaire, de nutrition et d’étiquetage des aliments. Les revenus des ménages et l’état sanitaire de la population peuvent également affecter les choix alimentaires, car les aliments nutritifs peuvent être plus coûteux et les maladies liées à l’alimentation peuvent avoir un impact sur la santé.

En somme, le modèle alimentaire est un système complexe qui est influencé par un large éventail de facteurs. Il reflète la culture et les valeurs de la société, ainsi que les conditions économiques, politiques et sanitaires dans lesquelles elle évolue. Comprendre le modèle alimentaire d’une société peut aider à élaborer des politiques efficaces en matière de sécurité alimentaire et de nutrition, ainsi qu’à promouvoir des choix alimentaires sains pour la population.

 

La présentation du modèle

En se basant sur les connaissances précédemment exposées, il est possible de présenter un modèle alimentaire en se penchant sur trois éléments fondamentaux : les pratiques alimentaires, la dimension de la consommation et l’origine des produits consommés.

Les pratiques alimentaires incluent la culture, les aliments consommés et les formes de consommation, et reflètent les traditions et les valeurs de la société. La dimension de la consommation, quant à elle, est influencée par des facteurs tels que la politique publique, les revenus des ménages et l’état sanitaire de la population. Enfin, l’origine des produits consommés peut varier selon les habitudes alimentaires de la société.

En prenant l’exemple de l’Algérie, il est possible d’esquisser le modèle de consommation alimentaire en se basant sur ces trois éléments. En étudiant les pratiques alimentaires de la société, il est possible de comprendre les habitudes alimentaires, les préférences culinaires et les valeurs culturelles liées à la nourriture. En examinant la dimension de la consommation, on peut déterminer les facteurs économiques, politiques et sanitaires qui influencent les choix alimentaires. Enfin, en examinant l’origine des produits consommés, on peut comprendre l’impact des importations et des exportations sur le modèle alimentaire de la société.

En somme, la présentation d’un modèle alimentaire nécessite une analyse rétrospective des pratiques alimentaires, de la dimension de la consommation et de l’origine des produits consommés. Cela permet de comprendre les habitudes alimentaires d’une société, de mettre en place des politiques efficaces en matière de sécurité alimentaire et de nutrition, ainsi que de promouvoir des choix alimentaires sains pour la population.

 

Les pratiques alimentaires en Algérie

La culture alimentaire

Le régime alimentaire algérien traditionnel s’inscrit dans le modèle alimentaire méditerranéen, qui est une pratique courante dans plusieurs pays situés autour de la mer Méditerranée. Ce régime se caractérise par une consommation importante de céréales (comme le blé et l’orge), de légumineuses (comme les pois chiches et les lentilles), de fruits (comme les oranges et les figues), d’herbes aromatiques (comme le thym et le romarin) et d’huile d’olive.

Les produits laitiers sont consommés avec modération, principalement sous forme de chèvre et de brebis, et dans une moindre mesure, de vache. Les œufs sont également consommés en quantités limitées, souvent incorporés dans des plats comme les omelettes ou les boulettes de viande. Le vin rouge est une boisson traditionnelle consommée en petite quantité pendant les repas.

En ce qui concerne la consommation de viande et de poisson, le régime alimentaire algérien est relativement faible en comparaison avec d’autres régimes alimentaires. La viande est souvent réservée aux occasions spéciales et est consommée en quantités limitées, tandis que le poisson est plus couramment consommé dans les régions côtières. Les plats à base de légumes et de céréales sont souvent privilégiés, tels que le couscous, les tajines et les soupes.

 

Aliments consommés

Le modèle de consommation alimentaire des Algériens est dominé par les céréales et le lait, qui constituent l’épine dorsale de leur système alimentaire. Les produits dérivés des céréales et du lait occupent une place importante dans leur alimentation. En plus de cela, l’huile, le sucre, la pomme de terre, l’oignon, la tomate et l’ail sont des produits stratégiques qui continuent à être soutenus par l’État.

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La disponibilités des aliments

Depuis l’indépendance de l’Algérie en 1962, la consommation alimentaire a connu une augmentation significative. Entre 1961 et 1990, la ration alimentaire consommée par les Algériens est passée de 1 723 à 2 944 calories et a continué à augmenter pour atteindre plus de 3 343 en 2019. Cette croissance a permis à l’Algérie d’être classée dans le groupe des pays à faible niveau de faim par l’IFPRI.

Cependant, cette évolution quantitative de la ration alimentaire a également conduit à une diversification de sa composition et à une augmentation de la consommation de produits industriels. Bien que la ration alimentaire soit suffisante en termes de quantité, elle reste déséquilibrée sur le plan qualitatif. Les habitudes alimentaires des Algériens tendent à se rapprocher de celles des pays développés, ce qui peut causer des problèmes de santé et des dépenses de santé accrues. En outre, des pertes et des gaspillages alimentaires sont observés.

Cette tendance est exacerbée par l’évolution relative des prix des produits alimentaires frais et industriels. Les prix des produits industriels augmentent moins vite que ceux des produits agricoles frais, ce qui rend les produits industriels plus attractifs pour les consommateurs. Les prix des biens alimentaires augmentent également à l’approche de certaines fêtes et événements tels que l’Aïd, le Ramadhan et les fêtes familiales. En conséquence, malgré une augmentation quantitative de la ration alimentaire, l’Algérie doit faire face à des défis pour améliorer la qualité de son alimentation et réduire les pertes et gaspillages alimentaires.

Céréales

En Algérie, les céréales représentent une part importante des apports énergétiques et protéiques de la ration alimentaire quotidienne, avec 54% et 62% respectivement. Les céréales occupent également une part importante des terres agricoles cultivées (40% de la superficie agricole utilisée) et des importations (40% de la valeur des importations).

Le blé dur reste la base de l’alimentation en céréales, notamment sous forme de semoule, mais il est de plus en plus concurrencé par le blé tendre utilisé pour la fabrication de la baguette, ainsi que par le maïs et l’orge.

Grâce à une forte consommation de blé dur, l’Algérie est classée parmi les plus grands consommateurs mondiaux de blé par habitant, avec plus de 200 kg par an, devant l’Egypte (131 kg) et la France (98 kg).

Lait

Le lait occupe une place prépondérante dans la ration alimentaire des algériens et apporte la plus grande part de protéines d’origine animale.

La consommation moyenne nationale a été évaluée ces dernières années à 3,7 milliards de litres/an, dont 2 milliards de litres de lait cru, 500 millions de litres de lait en poudre et 1,2 milliard de litres de lait en sachets. La consommation de lait qui était évaluée à 34 litres par an et par personne en 1967-68 (FAO) est passée à 61 litres en 1979-80 (ONS). Elle aurait plus que doublé en 2015 avec une consommation moyenne par habitant de 134 litres en équivalent lait, ce qui fait de l’Algérie le premier consommateur de lait et dérivés de la région Maghreb.

Huile

En Algérie, la consommation d’huiles alimentaires a considérablement augmenté ces dernières années en raison de l’augmentation de la population et de la croissance économique du pays. En effet, la consommation d’huiles est passée de 2,2 kg/habitant/an en 1975 à 13,4 kg/habitant/an en 2019.

La demande d’huiles alimentaires est principalement satisfaite par les importations, qui représentent environ 70% de la consommation nationale. L’huile de tournesol est la plus consommée en Algérie, suivie de près par l’huile d’olive. L’huile de soja et l’huile de palme sont également consommées, mais dans une moindre mesure.

Le gouvernement algérien a mis en place des politiques pour encourager la production locale d’huiles alimentaires afin de réduire la dépendance aux importations. Ces politiques ont notamment consisté en des subventions pour les agriculteurs et des mesures de protection douanière pour les producteurs nationaux. Toutefois, la production locale reste limitée et ne représente qu’une petite part de la consommation nationale.

Il convient également de noter que la consommation d’huiles alimentaires en Algérie est encore inférieure aux recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui recommande une consommation moyenne de 18 kg/habitant/an.

 

Sucre

L’Algérie consomme 1,1 million de tonnes de sucre. 

Viandes

L’Algérie consomme en moyenne 340 000 tonnes de viandes rouges et 240 000 tonnes de viandes blanches. La production moyenne annuelle est de l’ordre de 300 000 tonnes de viandes rouges ovines et bovines avec des importations d’appoint de 40 000 tonnes de viandes bovines congelées soit 12 % de la consommation. À cette quantité, s’ajoutent 240 000 tonnes de viandes blanches (poulet et dinde) issues totalement de la production avicole locale. On recense dans la filière avicole 1 950 producteurs privés qui s’activent dans l’élevage, l’abattage et l’importation.

Légumes

Concernant les fruits et légumes frais, l’offre globale est de l’ordre de 9 millions de tonnes environ, dont 5,5 millions de tonnes de fruits frais et 3,5 millions de tonnes de légumes. Les légumes frais sont issus de la production nationale alors que 250 000 tonnes/an de fruits (essentiellement banane et pommes) proviennent du marché international (Ministère du Commerce, 2016).

Consommation alimentaire en Algérie

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La dimension de consommation

Les consommations alimentaires de l’Algérie ont fortement augmenté depuis l’indépendance sur les plans quantitatif et qualitatif, ce qui a conduit à l’évolution du modèle alimentaire de base.

Cette augmentation s’explique par la croissance démographique, par la hausse des revenus et des dépenses en alimentation, mais aussi par des politiques agricoles et alimentaire de l’Etat, notamment la subvention de la production agricole et la subvention des produits alimentaires à large consommation. 

 

La population

La forte hausse de la demande de produits alimentaires est due d’abord à la croissance de la population. Faut-il rappeler en premier qu’en Algérie, la population totale a été multipliée par 4 entre 1960 (10,8 millions d’habitants) et 2020 (43,3 millions d’habitants), ce qui a démultiplié d’autant les besoins alimentaires.

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Les ressources financières des ménages

La demande sur les produits alimentaire a aussi été stimulée par l’augmentation des revenus de la population qui a été relativement forte. Le montant annuel perçu par les ménages est passé de 15,5 milliards de dinars en 1969 à 181 milliards en 1988, il est de 11 381,5 en 2018. En admettant que la croissance du PIB par tête d’habitant reflète la hausse des revenus des ménages, celui-ci – exprimé en US$ en parité de pouvoir d’achat et internationaux courants – a été multiplié par deux entre 1990 et 2019.

La hausse des revenus peut aussi s’apprécier à travers la dépense par tête pour la consommation alimentaire. Entre 2000 et 2011, celle-ci a été multipliée par 2,3 (ONS, 2015).

Un autre indice de la hausse des revenus des ménages est la baisse du taux de pauvreté. La Banque mondiale indique pour 2011 un taux de pauvreté de 5,5 %, avec un taux d’extrême pauvreté de seulement 0,5 %.  

 

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Les politiques publiques

Indissociable de l’intervention directe de l’État dans la gestion de l’offre, l’évolution de la consommation alimentaire est également liée aux mutations économiques et sociales intervenues depuis l’indépendance et auxquelles l’État est lié.

La politique alimentaire a été articulée avec les politiques de développement initiées par l’Algérie après l’indépendance. Elle avait comme objectif, de corriger les défaillances alimentaires et nutritionnelles héritées de la période coloniale et augmenter le degré d’autosuffisance en assurant à la population une disponibilité alimentaire stable.

Pour y arriver, l’État a mis en œuvre plusieurs mécanismes et politiques affichés par les plans de développement économique, et des politiques volontaristes en subventionnant les produits de base, valorisation du potentiel agricole existant, le développement des filières agroalimentaires et des importations d’appoint en facteurs de production agricoles. Ceci s’est traduit à l’amont par une subvention au secteur agricole par le financement de l’écart entre prix d’équilibre et prix réel de vente et à l’aval par un soutien alimentaire généralisé.

Soutiens à la production

L’État a joué jusqu’à maintenant un rôle de premier plan afin d’encourager la production des produits alimentaires, soit par la subvention de la production (subventionnant massivement les intrants chimiques, la semence et l’énergie), ou par des investissements directs (les volumes d’investissements ont été multipliés par 3,5 entre 1995 et 2015). 

Subventions aux produits alimentaires

L’évolution de la consommation alimentaire en Algérie est inséparable de l’engagement de l’Etat dans la gestion de l’offre de produits et des prix.

L’importance du soutien alimentaire apparaît à travers la nature des produits soutenus et le financement de l’écart entre prix d’équilibre (prix importations) et le prix au consommateur, c’est à dire le prix réel de vente. Les produits éligibles au soutien alimentaire tels que la farine, la semoule, le lait et l’huile forment l’essentiel de la ration alimentaire de la population. 

Le soutien systématique des prix des produits a été, en ce sens, à l’origine de l’accroissement de la consommation et, partant, de la demande en ces produits.

Par ces politiques de subventions généralisés les algériens ont délaissé la consommation de la semoule au profit de la farine, de l’huile d’olives au profit de l’huile de soja. La baguette, la pizza, ont laissé place au pain maison à base de semoule

La source des produits

Pour répondre à la croissance et à la demande en produits alimentaires, l’Etat a fait beaucoup d’efforts, réalisés principalement grâce à la croissance des productions locales en produits agricoles et agroalimentaires mais aussi grâce au recours aux marchés agroalimentaires mondiaux, financés principalement par les revenus en devises des hydrocarbures. Ceci traduit par une une grande fragilité du modèle à cause d’une gouvernance économique peu efficiente. 

 

La production agricole

Agriculture

La production nationale est marquée par un déficit structurel. Ce déficit structurel concerne des produits de base dans le modèle de consommation dominant en  Algérie (blés, légumes secs, lait, huiles alimentaires et matières grasses, sucre). Pour faire face aux besoins d’approvisionnement du marché national, l’Etat a continué de recourir aux importations lesquelles, malgré les progrès indéniables réalisés en matière d’accroissement de l’offre domestique, ne diminuent ni en volume ni en valeur.

Les filières stratégiques ont connu une croissance forte et soutenue et la politique de renouveau rural, second pilier de la politique agricole initiée dans les années 2000, a touché près de 6 millions de ruraux.

Pour aller dans le détail

La production agro-alimentaire

Consommation

Augmenter le degré d’autosuffisance alimentaire par la production agro­alimentaire nationale, tel est l’objectif que s’est fixé l’État algérien depuis l’indépendance.

 

La politique alimentaire a été articulée au développement agroalimentaire. L’industrie agroalimentaire vise un double objectif : approvisionner le secteur agricole en intrants et alimenter l’activité de la transformation des produits agricoles au profit des ménages. Les IAA sont une branche à faible valeur ajoutée expliquée en partie par leur dépendance vis-à-vis des produits boursiers (blé, lait de poudre, huiles brutes, sucre) dont les fluctuations des cours se répercutent sur les prix des produits.

Importations

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Pour faire face aux besoins d’approvisionnement du marché national, l’État a continué de recourir aux importations lesquelles, ne diminuent ni en volume ni en valeur, malgré les progrès indéniables réalisés en matière d’accroissement de l’offre domestique. Il est important d’être conscient du fait que la majorité de ces importations alimentaires concerne des aliments de base, en particulier des céréales, ainsi que des produits laitiers ce qui signifie qu’une grande partie de l’Algérie est désormais fortement tributaire des importations.

 

L’Algérie est aujourd’hui fortement dépendante de ses moyens de paiements extérieurs pour assurer ses approvisionnements alimentaires. Ainsi, la capacité permanente du pays à assurer à la population la sécurité alimentaire se fonde, en dépit des incitations consenties au monde agricole, sur les ressources des hydrocarbures. Cette politique sans ancrage direct sur le système productif national a nécessité non seulement des moyens financiers importants mais renforce également l’insertion du pays dans le marché mondial de l’alimentation au détriment du développement d’une base agroalimentaire au risque d’augmenter sa vulnérabilité alimentaire.

 

Si la baisse de ces moyens venait à se poursuivre sur les prochaines années – toutes choses restant égales par ailleurs – le risque politique serait grand de voir le pays dans l’incapacité d’assumer sa facture alimentaire. Le pays n’est pas à l’abri de chocs économique (baisse durable de nos ressources financières), commercial (aléa des marchés mondiaux), politique (conflits régionaux), ou naturel (cataclysmes, crise climatique ou sanitaire).  Des crises politiques pourraient enfin exercer une influence négative sur les capacités du pays à négocier les approvisionnements, notamment en céréales ou en produits laitiers, avec ses partenaires traditionnels (la France et l’Union européenne en particulier).

 

Là résident l’enjeu stratégique et le défi à relever. Pour cela, il faut repenser sérieusement les termes d’une sécurité alimentaire durable conjuguée à une souveraineté alimentaire a minima.