Définition
Algérie
Analyses
Ce document va commencer par clarifier un certain nombre de concepts de base sur le taux de change, le marché de change, la dévaluation, la dépréciation. Ensuite passer en revue la situation du marché de change en Algérie, officiel et parallèle, et finir par des analyses sur la montée de ce dernier et les projections sur les évolutions futures.
La monnaie est un pilier de l’économie et l’un des instruments les plus utilisés dans notre vie quotidienne, elle remplit une triple fonction de calcule économique, de paiement et de réserve de valeur.
Les relations monétaires internationales sont organisés dans le cadre d’un Système Monétaire International «SMI » selon un ensemble de règles qui servent à assuré les échanges et la circulation des monnaies et la stabilité du taux de change et la convertibilité des monnaies. Ce système a connu un passage d’un système de change fixe (Etalon or et le système Britten woods) au système de change flottant qui généralise les monnaies.
La politique monétaire a pour objectif de contrôler la liquidité de l’économie à travers l’offre de monnaie. L’application de la politique monétaire doit limiter l’expansion du crédit au cours de l’avènement de la manne pétrolière. La banque centrale intervient régulièrement sur le marché monétaire afin de maîtriser les taux d’inflation et de change.
Le taux de change est un des éléments de la politique monétaire, en effet, les autorités monétaires utilisent les instruments monétaires pour atteindre un certain niveau du change de la monnaie nationale sur le marché des changes.
Le taux de change d’une devise (appellation d’une monnaie qui est acceptée à l’étranger) est le cours, c’est à dire le prix, de cette devise par rapport à une autre devise.
On ne peut pas évaluer la valeur d’une devise dans l’absolu; c’est pourquoi elle est toujours exprimée relativement à une autre monnaie par un taux de change, et en observant les variations de ce taux dans le temps. Chaque devise a donc un taux de change vis-à-vis de chacune des autres devises. On parle de taux de change bilatéral pour désigner le rapport d’échange entre deux devises et de taux de change effectif lorsque l’on considère l’ensemble des taux de change bilatéraux. Pour l’établir on pondère en général chaque taux de change bilatéral par la part du commerce international du pays réalisée dans cette devise.
Le marché des changes est le marché sur lequel se retrouvent tous les participants désireux de vendre ou d’acheter une devise contre une autre. Dans le jargon financier, il est souvent question du Forex pour désigner le marché des changes ; contraction des termes anglais FOReign EXchange.
Les marchés des changes sont composés de banques, de sociétés commerciales, de banques centrales, de sociétés de gestion d’investissements, de fonds spéculatifs, de courtiers et d’investisseurs.
Les marchés de change sont interconnectés dans un vaste réseau électronique de banques, intermédiaires, institutions et courtiers (qui entreprennent des transactions par le biais des traders éventuellement). Le marché des changes détermine la valeur des monnaies en binômes, laquelle valeur s’appelle taux de change nominal. Les opérations de change se font soit sur le marché au comptant qui est très volatile, soit à terme ou les déterminants sont des facteurs fondamentaux tels que les taux d’intérêt relatifs et la croissance économique.
Pour l’Algérie le marché des changes se caractérise par une dualité de compartiments (officiel et parallèle) depuis de longues années.
La dévaluation est une décision officielle des autorités monétaires consistant à diminuer la valeur de la monnaie nationale par rapport à un étalon de référence (or, une autre monnaie, etc.).
Ainsi, après une dévaluation, il est nécessaire de fournir davantage de monnaie nationale pour obtenir la même devise étrangère qu’auparavant. Il est donc plus coûteux d’acheter à l’étranger. Inversement, les étrangers trouvent le territoire national meilleur marché (favorable au tourisme, favorable aux exportations, etc..).
Une dévaluation (ou l’opération inverse qu’est la réévaluation), n’est possible que dans un système de changes fixes, où les parités des monnaies correspondent à des taux de change officiels et stables par rapport à un étalon (exemple du système monétaire international de Bretton Woods)
C’est la constatation de la baisse de la valeur d’une monnaie sur le marché des changes, sans qu’elle soit le résultat d’une décision officielle des autorités monétaires du pays.
Dans un système monétaire international où les changes ne sont pas fixes, c’est à dire lorsque les Banques Centrales ne sont pas obligées d’assurer la stabilité de leur propre monnaie par rapport à d’autres devises, les taux de change fluctuent librement sur le marché des changes. La dépréciation correspond alors à la diminution de la valeur d’une monnaie par rapport à une ou plusieurs autres devises. Une dépréciation (ou, à l’inverse, une appréciation) peut être un processus très lent, à l’inverse d’une dévaluation qui est une modification brutale et officielle de la valeur d’une monnaie.
L’usage du terme de dévaluation (ou de réévaluation) est devenu impropre depuis l’abandon des parités fixes entre les monnaies en 1973. Il demeure cependant dans le cadre des accords Monétaires Européens puisque l’on parle de dévaluation ou de réévaluation lorsque l’on modifie les « cours-pivots » entre les monnaies appartenant au mécanisme de change du Système monétaire européen.
La politique monétaire définie par la banque d’Algérie a pour objectif ultime la stabilité interne et externe de la monnaie nationale comme il est stipulé dans son article 35 de l’ordonnance numéro 03-11 du 26 août 2010 modifiant et complétant l’ordonnance numéro 03-11 du 26 août2003.
La politique monétaire s’inscrit donc, dans la démarche globale du gouvernement qui vise à la réalisation du plein emploi et à l’équilibre de la balance des paiements, tout en préservant la stabilité des prix et du taux de change de la monnaie nationale. Le taux de change est donc l’un des éléments de la politique monétaire en Algérie.
La détermination de la valeur externe du dinar algérien a évolué dans le sens d’une plus grande flexibilité pour faire de la politique de change un levier de gestion macroéconomique.
Jusqu’en décembre 1973, le taux de change du dinar était fixé par rapport au dollar en raison de la prépondérance du pétrole dans les échanges extérieurs de l’Algérie. A partir du 1er janvier 1974 et pour se prémunir contre la volatilité du dollar, le taux de change était fixé par rapport à un panier de monnaies qui reflétaient la structure des échanges commerciaux du pays et qui faisaient l’objet d’ajustements occasionnels. A partir du 1er octobre 1994, la Banque d’Algérie a mis en place un système de gestion souple du dinar à travers des sessions quotidiennes de fixing avec la participation des banques commerciales.
Le 2 janvier 1996, le système a été remplacé par un marché interbancaire de devises. Les sessions de fixing et le marché interbancaire qui y a succédé font partie des réformes mises en place dans la cadre des plans d’ajustement du pays appuyés par le FMI (dans le contexte des accord de stand-by de mai 1994 à mai 1995 et de la facilite élargie de crédit de mai 1995 à mai 1998), la Banque mondiale, la Banque africaine de développement, l’Union européenne et les Clubs de Paris et de Londres. Ces réformes s’inscrivaient dans le contexte de la libéralisation des échanges extérieurs du pays et du passage à un système de taux de change flexible.
Ces réformes avaient ouvert la voie à la décision des autorités de :
(i) rendre le dinar algérien convertible en acceptant les obligations énoncées à l’article VIII, sections 2, 3 et 4 des statuts du FMI, avec effet au 15 septembre 1997. Cela signifie que le gouvernement s’engage à s’abstenir d’imposer des restrictions sur les paiements et les transferts pour les transactions internationales courantes ou à s’engager dans des accords de change discriminatoires ou des pratiques multidevises sans l’approbation du FMI ; et
(ii) accepter l’ouverture de bureaux de change.
Mais dans la réalité, le gouvernement avait demandé à l’époque et à juste titre une dérogation pour limiter les accès aux devises pour les ménages en raison des faibles réserves de change du pays en 1998. Toutefois, même lorsque le pays avait accumulé des niveaux élevés de devises après la remontée spectaculaire du baril du pétrole, l’exclusion des ménages du marché officiel des devises a été maintenue de façon surprenante.
La cession des devises a évolué dans le sens d’une certaine libéralisation. Jusqu’à fin 1994, les opérations de change avaient fait l’objet de nombreuses restrictions et conduites de façon administrative, avec un arsenal qui a inclus au fil des ans un système de taux de change multiples, des licences d’importation et des quotas de devises aux 5 banques primaires de l’époque qui en retour les mettaient à la disposition des entreprises publiques qui étaient domiciliées à leur niveau.
Le Marché interbancaire des changes (MIC) en Algérie, institué par le règlement numéro 95-08 du 23 décembre 1995, est un marché entre banques et établissements financiers où sont conduites toutes les opérations de change au comptant et à terme entre la monnaie nationale et les devises étrangères librement convertibles, constituant ainsi le lieu de détermination des cours de change des devises par le jeu de l’offre et de la demande.
La source principale de l’offre de devises sur le marché officiel est la Banque d’Algérie qui est l’acheteur exclusif des recettes d’exportations des hydrocarbures. Les autres exportations ne génèrent que des montants très faibles (soit environ 1 milliard de dollars) dont la moitié peut être conservée par les exportateurs (500 millions de dollars). Toutefois, même si cette structure a représenté un progrès dans le sens de la détermination du prix du dinar en termes de devises étrangères, il n’en demeure pas moins qu’il est asymétrique et se caractérise par un nombre limité de participants. En outre, les ménages algériens ont un accès limité qui ne leur permet pas d’acquérir les montants de devises suffisants pour financer leurs besoins en soins médicaux, les études de leurs enfants et leurs voyages, les invitant indirectement aller satisfaire leurs besoins sur le marché parallèle.
En 1964, date de création de la monnaie nationale, le dinar algérien était coté à 1 dinar pour 1 franc, et par rapport au dollar 1 dinar pour 5 dollars. Ce n’est que depuis 1974 que les pouvoirs publics décident d’aligner le Dinar algérien sur un panier de 14 monnaies.
Une première dévaluation intervient entre 1986/1990 de 4,82 à 12,191 (cours USD/DZD), de 150% suivi d’une seconde dépréciation, de l’ordre de 22% en 1991. Depuis 1986, le Dinar algérien et sous le choc de la baisse des recettes pétrolières, a connu une forte dépréciation, passant de 4,82 à 12,191 (cours USD/DZD), soit une dévaluation de plus de 150%.
La seconde dépréciation, de l’ordre de 22%, est intervenue en 1991 sous le contrôle du Fonds monétaire international (FMI).
Trois ans plus tard, une nouvelle dévaluation, cette fois-ci de plus de 40% par rapport au dollar américain, est opérée, Cette dévaluation fut fortement recommandée par le FMI et la banque mondiale.
L’année 1995 marque, elle, les premiers pas vers une convertibilité commerciale de la monnaie algérienne. Quant à sa convertibilité totale, celle-ci est reportée à plusieurs reprises.
Aujourd’hui, la valeur du dinar est de 120 dinars.
Formel et informel
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Les vocables se succèdent : dévaluation, dépréciation, surévaluation….Mais, la réalité est là. Le dinar algérien dégringole face aux autres monnaies. Sur la différence entre une dépréciation et une dévaluation, les responsables de la Banque d’Algérie estiment qu’il est « insensé » de parler de dévaluation du dinar du moment que le taux de change de ce dernier est soumis au régime flottant dirigé. Autrement dit, le régime flottant dirigé ne peut « cohabiter » avec la dévaluation.
C’est donc la Banque centrale qui administre la valeur du dinar en se référant à un panier de devises étrangères (euro, USD, yen, GPB…) pour déterminer une valeur de change à la devise nationale. Elle “réajuste” cette valeur en fonction de différents paramètres macroéconomiques (soldes extérieurs, la croissance économique, l’inflation, déficit budgétaire…). Elle fait à la “main” ce que les marchés font pour les devises librement convertibles en confrontant offre et demande.
Selon les chiffres de la Banque centrale, le taux de change moyen du dinar par rapport au dollar s’établissait à 93,24 DA à la fin mars 2015 contre 126 DA en 2020 et il va poursuivre sa chute, d’après le projet de loi de finance 2021. La dévaluation du dinar algérien par rapport au dollar américain, sera effective dès l’entame de l’année 2021. Elle sera massive, puisqu’elle portera sur environ 47% au total et, progressive, en ce sens qu’elle se fera en trois étapes. La première dévaluation qui sera effective dés le début de l’année 2021, sera de 10,33%, la seconde, opérée en 2022 , sera de 15,77% et la dernière qui interviendra en janvier 2023, sera de 21,21 %.
Selon les arguments de la Banque d’Algérie, celle-ci est obligée d’ajuster le taux de change nominal du dinar de façon à ce que le taux de change réel soit à son niveau d’équilibre qui est déterminé par les fondamentaux de l’économie nationale que sont le prix de pétrole, le différentiel de l’inflation et de la productivité entre l’Algérie et ses partenaires étrangers.
La Banque d’Algérie devant la baisse des recettes extérieures, cherche l’équilibre entre deux objectifs contradictoires: freiner les importations et préserver le pouvoir d’achat des citoyens.
Le gouvernement cherche à « casser la hausse effrénée des achats à l’extérieur » va demander à la Banque d’Algérie de changer de politique sur le dinar qui serait encore « surévalué » . Le but de la manœuvre est de mécaniquement renchérir les biens et les services importés : en effet, un dinar moins fort ne permet plus d’acheter la même quantité de produits. Ainsi, le gouvernement espère réduire la facture des importations et freiner la (sur) consommation des ménages.
La baisse du dinar et du pouvoir d’achat des Algériens n’est pas sans effets néfastes. Le risque inflationniste pèse lourdement sur l’économie du pays. D’autant plus que la Banque d’Algérie ne dispose pas du levier des taux d’intérêts directeurs, inopérants, pour réguler l’inflation. Or, cette dernière peut s’avérer être un véritable poison pour l’économie du pays.
Les chefs d’entreprise craignent des répercussions sur le prix de leurs intrants et la fragilisation de leur compétitivité.
Pour le secteur informel, une telle mesure réduirait considérablement leur marge de manœuvre spéculative.
Pour les adeptes de l’orthodoxie financière, l’abrogation de la loi sur la monnaie et le crédit rend otage la Banque centrale du pouvoir politique, ce qui explique selon eux les dérives monétaires successives.